Villa de Leyva et Bogota (Colombie)

Samedi 7 décembre : demain, c'est la Solennité de l'Immaculée Conception, journée fêtée en Colombie avec des animations : les Ferias de Luces. La ville où les manifestations sont les plus spectaculaires est Villa de Leyva, située à 140 km de Bogota. Du terminal de pasajeros de Bogota nous prenons un des rares bus directs pour cette ville, un peu plus de 3 heures en théorie. Mais les embouteillages dans le centre de Bogota et sur le périphérique sont monstrueux. il nous a fallu plus d'une heure et demie pour nous extraire de la Capitale, étonnant pour un samedi matin.

Le bus est complet, occupé par des groupes de jeunes qui s'en vont faire la fête dans la petite cité, nous ne serons pas seuls ! Nous l'avions remarqué en réservant l'hôtel, car la seule chambre disponible est située à presque 2 km de la ville, à flanc de colline et la nuitée nous revient à cinq fois le coût d'une nuit à Bogota, la loi de l'offre et de la demande !

Il pleut, en cette fin d'après-midi, cependant nous rejoignons vaillamment le centre ville à pieds : que la fête commence !

En Colombie, le profane et le sacré sont intimement liés et l'animation de la soirée débute par une cérémonie consacrée à la Vierge. Nous en profitons pour visiter l'église richement décorée, puis assister à la cérémonie se déroulant sur le parvis. Les fidèles ravis de notre présence, confient à Marie-Noëlle un cierge allumé (symbole des Luces) et lors du final nous embrassent ou nous serrent la main en nous souhaitant « La Paz », une des préoccupations majeures de la Colombie contemporaine.

Quelques milliers de sièges ont été disposés au centre de la place, nous en réservons pour une somme modique (3 €), mais la plupart des spectateurs s'assoient sur les marches (mouillées) de l'église ou restent debout. Quelques orchestres succèdent aux discours et nous attendons, car la pluie a retardé la mise en place des engins pyrotechniques. En effet, le clou de la fête est un concours de feux d'artifice entre 7 ''Polverias'' Colombiennes parmi les plus réputées.

Le public (plus de 30 000 selon les organisateurs et selon la police....) est patient, et si parfois un discours de remplissage dure un peu, il se contente de scander « Luces, Luces ». Avec presque deux heures de retard (nous bénissons le confort de nos sièges) le ciel commence à s'illuminer et s'enchaînent 7 spectacles magiques d'une durée d'environ 10 minutes chacun avec des originalités et des mélanges de couleurs et d'engins. Le fond musical est assuré en live par une soprano Colombienne, ce qui rajoute à la féérie du moment.

Les applaudissements sont nourris après chaque série de feux d'artifice et les noms des meilleures Polverias scandés par le public. Il est plus de minuit lorsque nous regagnons notre hôtel à pieds. Alors que nous attaquons le raidillon final, un 4X4 nous rejoint et ses occupants, des clients de l'hôtel, nous prennent spontanément en stop : muchas gracias !

Le lendemain nous profitons de cet hôtel, une ancienne Finca, joliment aménagée avec piscine alimentée par un petit rio. Mais nous nous trouvons à 2700 m d'altitude et si l'eau est naturelle, elle est frisquette; cependant, je ne peux résister au défi et plouf !

Puis nous enchaînons avec la visite de cette petite ville, classée au patrimoine Colombien, qui a gardé son aspect colonial avec ses bâtiments bas et ses rues pavées de gros galets. Elle possède quelques musées gentillets dont un consacré au peintre Luis Alberto Acuña qui vécut ici et un autre consacré à l'art religieux Colombien, musée situé dans le couvent des Carmélites vieux de plus de 350 ans.

Le soir, d'autres spectacles sont proposées et l'ambiance est plus calme, il y a moins de monde, les touristes étant rentrés à Bogota. Le public est majoritairement constitués de locaux, familles indiennes ou très typées, avec ponchos pour les hommes, bonnets style phrygiens pour les femmes, superbes. Du coup nous restons assis sur les marches du parvis de l'église au milieu d'eux, délaissant les privilégiés avec sièges (il ne pleut plus, les marches sont sèches...). A une heure de concert classique, succèdent 3 feux d'artifice par 3 Polverias différentes puis un concert de musique Salsa. Villa de Leyva mérite bien sa renommée de la meilleure animation pour la Feria de Luces.

Lundi nous rentrons à Bogota mais le seul bus direct de la matinée partait à 5 h, alors nous empruntons le colectivos pour rejoindre Tunja, une ville située à une trentaine de km sur un grand axe routier, où de nombreux bus circulent. Sur la carte ce n'est pas loin, mais nous sommes dans les Andes, il faut franchir un col pour passer dans une autre vallée (Tunja se situe elle même à plus de 2800 m d'altitude). A peine quelques minutes après notre arrivée à la gare routière de Tunja, nous embarquons dans un bus très confortable pour Bogota. Mais rusés, nous descendons dés l'entrée de la Megapole au Portal del Norte pour éviter les embouteillages du centre ville où se trouve le terminal de pasajeros.

Ce Portal est desservi par le Transmillenio, un réseau de bus performant circulant en voie propre et qui remonte rapidement les files d'autres véhicules au ralenti ou arrêtés : une bonne heure de gagnée !

Nous voici à une correspondance proche de notre but mais des locaux nous conseillent de continuer à pieds vers notre hôtel, le cente ville de Bogota commençant à être bloqué par des manifestants dont un groupe s'achemine vers nous en utilisant les voies des bus. Quelques photos et l'ambiance de la manifestation nous font oublier la marche supplémentaire avec sacs.

Nous retrouvons les manifestants le soir sur la Plaza Bolivar devant la Mairie, des dizaines de milliers de personnes de tous horizons, ambiance sympathique mais très véhémente.

Du coup, les spectacles avec illuminations, objets de notre présence en ce lieu, sont annulés, nous nous rabattons sur un restaurant où la télévision retransmet l'évènement en direct avec sous-titres en Espagnol. Nous commençons à comprendre : le Procurador General, du parti Conservateur, a destitué ce matin même l'Alcade Mayor de Bogota 'Gustavo 'Petro'' (d'un parti de Gauche) et la foule de ses partisans sont venus le soutenir. Le discours de Petro et les slogans des manifestants, sous-titrés, deviennent clairs pour nous. La destitution, assortie de 15 ans d'inéligibilité et d'interdiction de fonctionnariat a pour motif officiel, la gestion, soit disant peu efficace, du ramassage municipal des ordures. Ramassage que les Conservateurs veulent confier à des sociétés privées. Cette animation n'était pas au programme, mais cela nous montre un aspect de la vie politique Colombienne.

La ville n'est pas très riche en beaux monuments, et quelques demi-journées de visite peuvent suffire mais avec les animations de Noël, les journées sont bien remplies

Après une visite rapide à la Cathedrale, nous commençons par la visite du Musée de l'Or car n'oublions pas que nous sommes au cœur du mythe de l'El Dorado : en plus des jolis bijoux indiens à admirer, la présentation est orientée sur les valeurs symboliques des bijoux et donc des rites et coutumes des diverses civilisations pré-hispaniques (en Colombie, l'expression "pré-colombien" n'est guère usitée). Après quelques heures, les 3 niveaux du Monde des religions indiennes n'ont plus de secret pour nous, surtout après la séance dans la salle des offrandes !

Ensuite, nous nous rendons en funiculaire à Montserrat, une basilique nichée sur une crête de la Cordillère Orientale et qui domine Bogota de 500 m : altitude 3175 m, on s'y essouffle vite en gravissant les marches autour du sanctuaire, mais vue imprenable sur la Mégapole.

Puis nous retournons en ville pour quelques visites et les illuminations du soir, dont la première séance à 18 h est maintenue, malgré la présence de la manifestation de soutien à Petro.

Il y a encore plus de monde que la veille, bien mieux organisés, avec des belles banderoles, un podium couvert installé, ce n'est plus la spontanéité du premier soir, mais c'est tout aussi véhément : nous vivons en direct le début du mouvement de « los indignados » de Bogota, des tentes sont dressées sur la place.

Le lendemain, l'activité principale est la visite du parc des expositions où se tient pendant les fêtes de Noël « Expo Artesanat » des différentes régions de la Colombie. Beaucoup de vannerie, de colliers, de tissages (sacs, hamacs, écharpes, ponchos, chapeaux...) j'ai failli craquer pour un poncho mais l'aurais-je porté ? Il y a dans cette expo des animations musicales et gastronomiques mais un des éléments les plus typiques est le faciès et la tenue de la plupart des exposants : des indiens et indiennes pur jus : superbes !

Nous retournons dans le centre pour quelques visites, mais la plupart des monuments ne sont plus accessibles, le quartier où se situe les Ministères, est en grande partie bouclé pour cause de manifestations : les partisans de Petro campant sur la place mais aussi les étudiants des carrières de santé, protestant contre une nouvelle réforme (phénomène quasi universel !)
Puis nous nous dirigeons vers le lac du Parc Bolivar pour assister à un autre spectacle « Luz y Agua ». La foule est tellement dense qu'il nous faut plus d'une demie heure pour pénétrer dans le parc, mais le spectacle en vaut la peine, musique, jets d'eau avec effets de lumière, projections sur murs d'eau...

Lorsque nous sortons du parc vers 21h, nous nous rendons compte que la file d'attente pour les séances suivantes, a doublé de longueur....

Le jeudi est consacré à la visite de la première merveille de Colombie (dixit l'Office de Tourisme), la ''Catedral de sal'' de Zipaquira située à une cinquantaine de km de Bogota, le trajet s'effectuant en bus colectivos à partir du Portal del Norte. Peu avant l'arrivée à la gare routière de Zipaquira, un passager nous signale spontanément que si nous allons à la Catedral de Sal, il vaut mieux descendre au prochain carrefour et en fait part au chauffeur qui gare prestement son bus et nous indique le chemin à emprunter : un exemple parmi de nombreux autres de la gentillesse des Colombiens !

Ce lieu de culte est situé dans une mine de sel exploitée depuis des centaines d'années par les indiens Muiscas, d'abord pour leur propre compte, puis pour celui des Conquistadores etc...

Nous pénétrons dans la mine par un ancien conduit d'aération, bordée de chapelles latérales creusées dans le sel et figurant les stations du chemin de croix, pour enfin parvenir aux immenses salles, elles aussi creusées dans la montagne de sel, dont une est aménagée en Église : 200m de long sur 40 de large et une vingtaine de haut, les mineurs ne manquaient pas de place pour prier avant l'embauche. Une croix de sel éclairée, monumentale surplombe l'autel : impressionnant, d'autant que nous sommes à 120 m sous terre !

De retour à Bogota, le soir nous arpentons de nouvelles rues et parcs illuminés et plus on avance dans la nuit, plus la foule est dense et vers 23 h il devient difficile de progresser. Détail amusant : lors de notre visite vespérale à la foule de Los Indignados, deux groupes de personnes (des voisins de l'hôtel) nous ont reconnus et chaudement salués, des connaissances locales à 8000 km de chez nous !

Notre quatrième journée dans Bogota sera encore bien remplie de visites entrecoupées de longues marches. Cette ville animée est agréable à parcourir mais fatigante avec l'altitude qui essouffle vite et la pollution automobile qui doit aussi raréfier l'oxygène.
Grande déception dans le centre ville, la cathédrale que nous voulions revisiter ainsi que les églises voisines sont encore bouclées par la police et l'armée par crainte d'une occupation par "los indignados" dont le mouvement ne faiblit pas (nous avons croisé 2 autres spots de manifestation de soutien à Petro dans Bogota, dont celle des artistes, assez originale).

Du coup nous dirigeons nos pas vers le ''Museo Nacional'' dont certaines salles sont intéressantes et dont le cadre est l'ancienne forteresse prison. A la sortie du musée, une bonne surprise nous attend : un concert sur le parvis par l'Orchestre Philharmonique de Bogota, et nous nous régalons d'une heure de musique moderne latino-américaine, bien interprétée

Dans l'après-midi nous nous déplaçons vers le quartier de San Jose où en passant avec le bus, j'avais repéré de nombreuses et belles peintures murales et pousserons une visite au cimetière, pour voir les tombes et mausolées des Grands Hommes de Colombie, dont le Conqistador Quesada, fondateur de Bogota et à l'origine du mythe de l'El Dorado qu'il cherchera une grande partie de sa vie (il vécut jusqu'à 80 ans) et servit de modèle à Cervantès pour son Don Quichotte.

Un coup de Transmilenio nous propulse le soir dans la Zona T, un autre quartier, réputé pour son animation nocturne et là en plus des illuminations et nombreux bars et restaurants, surprise : des grands magasins modernes avec toutes les grandes marques de vêtements, chaussures, articles de luxe : une autre image de Bogota, pour riches Colombiens et touristes fortunés...

Samedi matin, une dernière visite du quartier de la Candelaria et du camp des Indignados où un des partisans de Petro me donne un cours détaillé de politique Colombienne avec des comparaisons avec la France, en citant des hommes politiques et des auteurs Français : très intéressant mais mon espagnol ne me permet pas encore de comprendre toutes les nuances du propos ni de poser des questions.

Dans l'avion qui nous ramène à Santa Marta et au bateau, nous repensons à ce séjour Bogotanais, très dense et dont l'agrément a été amplifié par les animations de Noël et les manifestations pro Petro et aussi par la gentillesse permanente des Colombiens.

Mardi 17 décembre : après quelques jours de récupération, nous rentrons en France pour les fêtes de fin d'année, un break dans la croisière, mais le plaisir de retrouver la famille et les amis.

Retour en Colombie le vendredi 10 janvier 2014, pour d'autres visites et navigations mais cela est une autre histoire.

Plus de photos sur Picasa en cliquant ici

Une des nombreuses Pinturas Murales de Bogota

Comments

[Martine]

Encore une jolie ballade de partagée ! Merci !
Je vois avec plaisir qu'un des cousin de "Serge le lama bordelais" est venu vous saluer.
Envie lui aussi d'une sortie en Europe ?